11 mars 2020

Très lentement

Suivant le principe konmari (une fois n'est pas coutume), je garde l'abonnement aux enchères Drouot parce que j'ai plaisir à les consulter, toujours pour le vocabulaire utilisé pour décrire les objets.

Aujourd'hui, prises macassar  (pourquoi pas anses?) revient à deux reprises dans ces services à thé qui se suivent.
N'ayant aucun projet de miser sur les articles offerts, je consulte rarement le prix plancher. Mais cette fois, le souvenir de la mère de Romain Gary me fait comparer ceux des cuillères et des services à thé: 80 euros pour ceux-ci, 200 pour celles-là!  Je n'essaierai pas de comprendre cette disparité et continuerai à lire le blogue si instructif - et perturbant - de l'amateur brocanteur local, tout en me rappelant qu'on ne peut être sûrs de rien.

Doris voudrait aussi que ce soit Jenny qui hérite de toutes les jolies choses qu'elle possède: les meubles, les tableaux, la tasse peinte à la main. Elle aimerait que ses affaires ne terminent pas dans une benne à ordures. Elle frémit à cette idée, pose les doigts sur le clavier et commence à écrire pour faire taire ses pensées.

Le petit carnet rouge de Sofia Lundberg 2018 Calmann-Lévy 

Les objets devenaient des déchets dès qu'ils étaient séparés de leur propriétaire et de leur passé - sans Lily, son vieux couvre-théière était répugnant, avec son motif aux tons passés représentant une ferme, ses taches brun pâle sur le tissu bon marché, son rembourrage d'une minceur pathétique. Tandis que se vidaient les étagères et les tiroirs, et que se remplissaient les caisses et les sacs poubelles, Henry a compris qu'en réalité on ne possédait rien. Tout est loué, ou emprunté. Nos biens nous survivront, nous finirons par les abandonner. Les Perowne ont travaillé toute la journée et sorti vingt-trois sacs pour les éboueurs.
 Samedi de Ian McEwan 2006 Gallimard 

Il y a exactement trente sacs.
Je les ai achetés à l'épicerie du coin – un moment de magasinage que je n'oublierai pas de sitôt.
Planté dans l'allée des produits ménagers, je me demandais combien de sacs à déchets seraient nécessaires pour contenir les innombrables souvenirs que ma mère avait accumulés depuis 1966. Quel volume pouvait bien occuper trente années d'une vie? Je rechignais à faire l'indécent calcul. Quelles que fussent mes estimations, je craignais de sous-estimer l'existence de ma mère.
J'avais jeté mon dévolu sur une marque qui semblait assez résistante. Chaque paquet contenait dix révolutionnaires sacs à ordures en ultra-plastique d'une contenance de 60 litres.
J'en ramassai trois paquets, pour un total de 1800 litres.
Ces trente sacs se sont avérés suffisants – bien qu'il m'ait parfois fallu insister avec la plante du pied – et maintenant les éboueurs s'emploient à les catapulter dans la gueule du camion. 
 Nikolski de Nicolas Dickner 2007 Alto
 

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