(Pékin, 16 octobre 1917)
Quant à rester à Pékin, m'y déciderai-je?... Il paraît peu possible d'y vivre à l'écart des Occidentaux. Les Chinois éprouvent plus de difficultés que les hindous à comprendre qu'un Occidental soit épris de calme, de simplicité. Ici, dans une grande ville, ils ne connaissent qu'une sorte d'Occidentaux, le monde piaffant des ambassades et le monde agité des missionnaires, l'un et l'autre intimement liés. Un artiste, un penseur qui s'en va à pied, flânant, s'asseyant une heure pour rêver dans l'enceinte d'un palais en ruine, ou scrutant l'intérieur des boutiques, regardant les visages défilant parmi la cohue dans la rue, s'intéressant aux gestes de la vie du pays, aux côtés caractéristiques de la mentalité, de la race, ce sont des personnages inconnus presque partout en Orient. Il n'est point question de vie sauvage, ici, nous sommes en pleine civilisation et si j'y demeure, la force des choses me poussera aux ¨thés¨ de quelques aimables dames des missions américaines ou anglaises ou à ceux de non moins charmants compatriotes du monde de la légation. Eh bien, je ne suis pas en Orient pour savourer des gâteaux rappelant ceux que je puis avoir chez nous et jouir de conversations dont l'équivalent aussi, m'attendrait chez nous.
Alexandra David-Néel Journal de voyage 1 Presses Pocket
1 commentaire:
... encore plus heureuse d'avoir à lire un David-Neel dans pas longtemps... une autre façon d'être au monde. Merci de cet extrait encore si parlant.
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