Journal d'un corps de Daniel Pennac |
Il y a peu de thé, du plus épique:
61 ans, 7 mois, 17 jours Lundi 27 mai 1985Accident stupide. Lundi de Pentecôte. Nous prenions le thé chez Madame P., vieille amie de la défunte mère de Mona, qui va sur ses cent deux ans. Villa néovictorienne, le thé servi dehors sous un platane poussé au beau milieu d'un court de tennis!...Boire le thé sous cet arbre c'est s'installer tout vivant dans un tableau de Magritte. Le jeu consiste à ne pas s'en étonner auprès de la vieille dame....Bref, nous sirotions notre thé quand un chien a fait irruption dans la propriété. La vieille dame l'a repéré du coin de l'oeil et s'en est offusquée....Hôpital: ébahissement du médecin de garde devant la diversité des dégâts: “Que vous est-il arrivé?” Difficile à expliquer en quelques mots: le thé, le tennis, Magritte, le chien, la vieille dame, le fil de fer, bref, le plus gigantesque désastre de l'histoire du thé mondain. Piqûre antitétanique (le fil de fer était rouillé), huit points de suture le long de la calotte crânienne, On a voulu vous scalper?...Plus tard, Mona me demande ce qui m'a pris de bondir comme ça.
- Je crois que je m'ennuyais un peu.
à l'inévitable san-thé:- Ce fil de fer aurait pu te décapiter.
Même jour, 17 heures (75 ans, 11 mois, 2 jours Dimanche 12 septembre 1999)
J'écris cela en buvant mon thé. Renoncé au café depuis mon opération. Impression que le thé me nettoie. Une sorte de douche intérieure. T'en bois un, t'en pisse trois, disait Violette. Peut-être un jour passerai-je à l'eau chaude, comme sur sa fin la tante Huguette.
2 commentaires:
J'avais bien envie: coupler les deux. Au final, je n'ai lu ni l'un, ni l'autre.
Et tu n'en as plus guère le temps, avec tes 7 heures d'études quotidiennes.
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