19 mars 2015

mots

Nous prîmes un thé dans un vaste restaurant désert. Nous étions les seuls clients. Il était situé au sommet d’une falaise, avec une vue panoramique.-Voulez-vous voir la Caverne du Dragon?Elle me conduisit au premier étage dans une salle à manger décorée en grotte. Elle avait des murs en fibre de verre, des rochers en plastique chocolat, des lumières qui clignotaient dans des stalactites de plastique, et chaque table était dressée à l’intérieur d’une crevasse d’un vert noirâtre, avec de la fausse mousse et des rochers. L’idée n’était peut-être pas mauvaise en soi, mais c’était la démonstration que les Chinois ne savent jamais quand s’arrêter. C’était sans forme, sans art, kitsch au-delà du grotesque, un endroit que l’on avait enlaidi à plaisir, et qui sentait mauvais, comme un gros jouet de plastique qui commence à fondre et à puer. Vous posiez vos fesses sur les rochers ratatinés et vous vous cogniez la tête contre les stalactites tout en mangeant des joues de poisson au gingembre frais.  
Paul Theroux La Chine à petite vapeur 1989 Riding the Iron Rooster 1988

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