When she closes her eyes, Grace can see her daughter clearly: three years old, sitting at the scarred wooden table in their first apartment in Brighton. She threw tea parties with the set Grace had brought for her at Woolworth’s. Plastic plates, saucers, cups, and a teapot with a rose pattern, which had begun to flake off from too much use. Gráinne prepared the pretend tea the way her grandmother did - scalding the pot, shaking in some oregano that represented the loose tea they’d drunk in Ireland. During tea parties, their kitchen would smell like a pizza parlor. Gráinne set places for her dolls, one for the kitten (who stayed because of the milk in her tiny saucer), and gave the least battered pieces to her mother. She always laid one extra place, reverently, opposite Grace, and left the chair empty.
¨Who’s that for, sweetie?¨ Grace asked once.
¨Is it for the pirate queen?¨¨Nope¨, Gráinne said, pouring the flecked green water into the tiny cups. Dada.¨
The smell of oregano and warm milk turned Grace’s stomach.
¨You still think Dada’s coming?¨ Grace whispered. Gráinne gave the empty seat a sugar cookie.
¨First he’s gotta escape from the mermaid pirates,¨ Gráinne said. ¨Will you take sugar?¨ she added, in her grandmother’s accent, holding a spoon out to her mother’s cup.
Grace said nothing else the whole year during which Gráinne performed this ritual. Sometimes, watching the determination in the girl’s face as she laid the table for tea, Grace would shiver, and look toward the doorway, half-expecting their absent guest to appear. Gráinne never mentioned her father except at these tea parties, and
Grace debated with herself about the best way to handle the subject.
Lisa Carey The Mermaids Singing 1998
Quand elle ferme les yeux, elle revoit clairement sa fille à l’âge de trois ans : elle se tient devant une table au bois éraflé dans leur premier appartement à Brighton. Elle joue à la dînette avec le service à thé que Grace lui a acheté dans un grand magasin populaire : assiettes en plastique, soucoupes, tasses, théière ornée d’un motif de roses qui commence à s’écailler à force d’avoir servi. Grainne prépare le thé à la façon de sa grand-mère; elle ébouillante la théière et place à l’intérieur un peu d’origan censé représenter les feuilles du thé qu’elles buvaient en Irlande. Avec cette odeur d’origan, on se croirait soudain transporté dans une pizzeria. Grainne met un couvert pour chacune de ses poupées, un pour le chat, seulement attiré par le lait dans la minuscule soucoupe; elle tend à sa mère la vaisselle la plus abîmée. Avec des
gestes solennels, elle ajoute toujours un dernier couvert en face de Grace, et
laisse la chaise vide.- Pour qui est-ce, ma chérie? lui demande Grace un jour. Pour la reine des pirates?
- Non, répond-elle en versant le liquide verdâtre dans les tasses miniatures. C’est pour papa.
L’odeur de lait chaud et d’origan soulève le cœur de Grace.
- Tu penses toujours que papa va venir, murmure-t-elle.
Grainne pose un gâteau devant le siège vide.
- D’abord, il faut qu’il échappe aux pirates-sirènes qui le retiennent prisonnier. Tu prendras du sucre? interroge-t-elle avec l’accent de sa grand-mère, en tendant une cuillère au-dessus de la tasse de sa mère.
Un an durant, Grainne continua d’accomplir ce rituel. Grace ne lui posait plus de questions mais parfois devant la détermination de sa fille lorsqu’elle dressait la table pour le thé, la mère frissonnait et tournait les yeux vers la porte d’entrée, s’attendant presque à voir apparaître l’invité absent. Comme Grainne ne parlait de son père que lorsqu’elle jouait à la dînette, Grace se demandait si elle devait ou non aborder le sujet avec elle. Comment expliquer quelque chose que vous ne comprenez pas vous-même à une petite fille de trois ans?
Lisa Carey L'île aux sirènes 1999 Libre Expression
1 commentaire:
Quel joli titre pour un post !
Parterni Thé !
J'adore !
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